« On voyage mieux dans le souvenir des autres .»
Est-ce à dire qu'on marche sur leurs traces, qu'on met ses pas dans leurs mots ? Ses mots dans leurs pas. Ce que fait Jean-Jacques Salgon avec René Caillié ou Rimbaud. Que c'est dans leurs livres que nous avons appris l'ailleurs, découvert l'autre qui vivait en nous, que c'est de cela que nous avons la nostalgie, le désir, que c'est ce qui nous pousse à partir ? À écrire. Pour tenter de les retrouver : de se retrouver. Que c'est cela, l'exotisme ?
Cette phrase anticipe-t-elle notre disparition ? Est-elle invitation, non pas au voyage, mais à rester ? Comme trace. Comme souvenir. À continuer à vivre dans la mémoire de ceux qui nous survivront. À vivre à travers eux. Faut-il compter sur la Postérité, s'en remettre totalement à elle ? Faut-il comprendre que c'est seulement où nous ne serons plus, quand nous ne serons plus, quand de nous il ne restera plus que quelques livres, que tout commence ? Quand d'autres nous liront. Rassembleront les membres épars du poète. Ou simplement chercheront qui se cache derrière ce titre qui les a accrochés. Parce qu'il dit que tout est présent, même le passé. Et que tout est cadeau aussi. Comme ceci, qu'on peut lire comme on cueille le jour :
« Voyager, c'est une façon de dire : ma vie ne ressemble à rien, elle n'a pas encore eu lieu. Rares sont ceux qui parviennent ainsi à se tenir longtemps à l'écart d'eux-mêmes. Tout Rimbaud finit par trouver son Abyssinie. »