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28 août 2019 3 28 /08 /août /2019 14:17

L'explosion d'un cornichon d'âne est sans doute moins spectaculaire qu'une éruption de l'Etna. Ce n'est même pas une explosion de couleurs. Ceux qui gardent à Corfou le château de Gardiki, la forteresse byzantine au sud de l'île, sont jaunes pour les fleurs, uniformément jaunes, d'un jaune sans nuances. Mais on parle ici du fruit. D'un fruit explosif.

Arrivé à maturité, le fruit de l’Ecballium elaterium se détache brutalement de son pédoncule et expulse à plusieurs mètres le gel qu’il contient. Il emporte avec lui la quarantaine de graines protégées dans le fruit. Un simple contact déclenche une violente explosion, et tant pis pour vous si votre tête se trouve sur le chemin des graines. Je vous aurai prévenu.

Heureusement, on n'était pas nombreux ce jour-là à parcourir les ruines de Gardiki. À risquer une blessure aux yeux. Qui se remirent difficilement de cette visite, mais pour une autre raison : le magnifique tableau qu'offraient ces drôles de plantes avec leurs fruits et surtout leurs fleurs.

On n'aura donc pas eu l'occasion de tester les propriétés purgatives de cette cucurbitacée. Ni, si le dosage était mauvais, sa toxicité.

Le cornichon ou concombre d’âne est une plante rudérale du pourtour méditerranéen. Elle croît parmi les décombres et sur les bords des chemins. On la connaît sous d'autres dénominations : concombre ou cornichon sauteur, cracheur, concombre sauvage, momordique, du diable, et j'en oublie certainement.

Il est l'équivalent méditerranéen de notre balsamine, une non indigène que nous avons accueillie et adoptée, et qui cache avec bonheur les blessures de notre jardin (même si elle a un peu tendance à se répandre). Comme elle, le cornichon d'âne couvre les ruines sans masquer le château, elle garde Gardiki et éloigne pas mal d'ennemis dont le cancer.

J'ai songé, avant de quitter Gardiki et pour en garder chez moi une trace, à glisser dans mes bagages quelques boutures du précieux concombre. Histoire de pimper mon jardin avec des souvenirs de voyage. Il ne s'y sentirait pas trop seul, entre l'olivier et le cyprès. Ils auraient bien des choses à se raconter, la balsamine et lui. Et le buddleja du père David dont nous contenons comme nous pouvons, en le laissant dans son pot, l'expansion.

Au dernier moment, je me suis abstenu. J'ai retenu mon geste. Un geste qui eût été fatal à la biodiversité. Ce faisant -ou ne faisant pas-, j'ai évité l'arrivée d'une nouvelle non indigène, une introduction que j'aurais eu le plus grand mal à présenter comme accidentelle. Je n'ai pas ajouté le cornichon d'âne à la liste de nos « rapines ». Ni à celle, non moins longue, des Espèces Exotiques Envahissantes qui menacent la flore et la faune locales, et l'économie du pays.

CORNICHON D'ÂNE
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commentaires

P
Ce cornichon est loin d'être sot ! et ce sillon labellisé EEE d'une fécondité... rafraîchissante même sous le cagnard. Enfin, goûter ses doubles et triples niveaux, une délectation. Quant à retenir un geste aux conséquences infinies pour la planète, relève de l'héroïsme. Résumons, tout est parfait. Hic et nunc, et même hihan.....
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