Sorti de la tête d'un poète -de Gabriele D'Annunzio si l'on en croit la légende-, sorti tout habillé, d'abord d'un complet-veston dans la bonne vingtaine de films muets dont il est le héros récurrent, puis de muscles, de ses seuls muscles quand, à l'instar d'Hercule, il nous donne à voir ses fatiche, ses travaux (il y en aura plus de douze!) dans des films scope-couleur, Maciste devient Maciste au tournant des années soixante.
C'est le formidable succès, en 1957, des Douze travaux d'Hercule, qui fait basculer sa carrière. On tourne Hercule sur Hercule, se disent les producteurs. Pourquoi ne pas ressusciter cette vieille gloire du cinéma muet? Il quittera son costume un peu élimé de détective et montrera comme Hercule ses muscles. Et comme lui incarnera le Bien.
On le verra ainsi, entre 1960 et 1964, jouer dans vingt-cinq films le rôle du redresseur de torts, à la force herculéenne.
Affrontant des hommes-taupes, esclaves des ténèbres, dans Maciste, l’homme le plus fort du monde (1961).
Bravant les forces militaires du redoutable empereur Kublai Khan pour venir au secours du peuple chinois, réduit en esclavage, dans Le Géant à la cour de Kublai Khan (1961).
Se battant sur tous les fronts pour sauver les humains dans Maciste contre le Cyclope (1961).
Tuant un monstre aquatique et vainqueur de l'Hydre à trois têtes dans Maciste contre les monstres (1962).
Dans Le Trésor des Tsars (1964), un colosse est retrouvé congelé par des archéologues russes. Ramené à la vie, l'homme le plus fort du monde refuse de servir le pouvoir autocratique de Nicolas, il prend le parti du peuple russe opprimé.
Il combat tour à tour, et parfois simultanément, Hercule, Samson, Zorro et, dans Maciste contre les hommes de pierre (1964), des extra-terrestres venus de la Lune.
On le retrouve dans une parodie de péplum avec Totò dans Totò contre Maciste (1962).
Dans Maciste contre la reine des Amazones, un film érotique sorti dans les salles françaises en 1974 sous le titre Les Amazones de la luxure.
Et, en 1975, dans Les Gloutonnes, également connu sous le titre Les Exploits érotiques de Maciste dans l'Atlantide.
Voilà pour les travaux d'Hercule. De cet Hercule du pauvre que les méchants voyaient en lui. Et qu'il fut. Et de plus en plus.
Et puis le vent a tourné. La fortune est arrivée, lui offrant une troisième vie, un nouveau personnage, celui de l'oligarque en proie à l'hybris. De « l'homme le plus riche du monde ». De l'être qui n'est qu'un corps. Constitué d'instincts et désirant accroître sa puissance.
Oubliés les nanars, les navets, Maciste enchaîne les succès. Il tourne film sur film. Un film par jour. Un jour c'est Maciste contre Thierry Breton. Contre Bruxelles. Le suivant c'est Maciste contre les idiots (Olaf Scholz, Keir Starmer). Contre le Tyran (Steinmeier). On ne l'arrête plus. On le voit partout. L'ancienne gloire du muet a son mot à dire sur tout.
Aujourd'hui, 25 janvier 2025, à deux jours des cérémonies du 80e anniversaire de la libération du camp d'extermination d'Auschwitz, celui qui n'a pas fait un salut nazi est intervenu dans un meeting, via vidéo, pour soutenir une nouvelle fois l'AFD. Qui incarne selon lui «le meilleur espoir pour l’Allemagne». Dans une intervention décousue, mais sous les applaudissements nourris du public, il a loué la «nation allemande» qui remonte à «des milliers d’années». L’empereur romain Jules César avait déjà été «impressionné» par la volonté de combattre des tribus germaniques. Le gouvernement actuel «réprime agressivement la liberté d’expression», a-t-il encore affirmé. L’AFD doit donc «se battre, se battre, se battre», notamment pour «plus d’autodétermination pour l’Allemagne et pour les pays d’Europe et moins de Bruxelles».
Le 9 janvier, il s'était « entretenu » avec la cheffe de l'AFD, en direct sur son réseau social X. Interrogée sur les idées qu'elle défend, Alice Weidel avait profité de l'occasion pour tenter de dédiaboliser son parti et d'en promouvoir le libertarisme. Et bien sûr de se démarquer d'Hitler. Qui était tout sauf un conservateur.
« Sous le IIIe Reich, les national-socialistes, comme le dit leur nom, étaient socialistes, avait-elle osé. Hitler était communiste et se considérait comme socialiste. L’État a (sous Hitler) nationalisé l’industrie et relevé les impôts. »
Voilà comment Maciste devient, sous nos yeux, suprémaciste, comment le champion du droit et du Bien met sa force herculéenne au service du Mal : du racisme le plus décomplexé.
En soutenant l'AFD en Allemagne et l'UKIP au Royaume-Uni, en s'appuyant sur Viktor Orban et surtout Giorgia Meloni pour déstabiliser l'Europe.
Giorgia Meloni, une amie, invitée à rencontrer Trump à Mar-a Lago.
Lequel déclare : « Je suis ici avec une femme fantastique, la Première ministre d’Italie. Elle a conquis l’Europe ».
Giorgia Meloni s'apprête à signer un contrat avec Starlink. Une démarche qui viole le principe de coopération loyale avec les autres pays membres associés au projet IRIS2. Et qui représente un risque majeur pour la sécurité intérieure de l'Italie et de l'Union Européeenne, car Starlink vehiculera aussi les communications classifiées entre services secrets civil et militaire.
Mais c'est si peu important. Moins important en tout cas que les 3 millions de dollars alloués par la Fondation Musk pour financer des recherches sur la Rome antique. Avec deux grands domaines d’intervention : l’un consacré à la conservation du patrimoine archéologique romain, l’autre axé sur le déchiffrage des papyrus d'Herculanum, des 1838 rouleaux carbonisés par l'éruption du Vésuve en 79 après Jésus-Christ, et que l'on a commencé à lire.
Grâce à un trio de chercheurs (dont Luke Farritor, étudiant en stage chez SpaceX), grâce à la tomographie à rayons X et à l'Intelligence Artificielle, est apparu le mot πορφύραc (porphyras), « pourpre » en grec ancien. C'est le premier mot lu sur un rouleau d'Herculanum non ouvert. Sans que le papyrus soit déroulé physiquement.
Mais les vainqueurs du Vesuvius Challenge ont aussi révélé plusieurs passages presque complets du texte ancien.
Un texte de Philodème de Gadara, peut-être écrit de sa main.
Philodème de Gadara -aujourd'hui Umm Qays, en Jordanie-, passé par Athènes et venu professer la philosophie d'Épicure en Campanie. Où il installe son « jardin », et sa bibliothèque. Dans une somptueuse villa, proche d'Herculanum, propriété de Pison -Lucius Calpurnius Piso Caesoninus-, homme politique romain du Ier siècle av. J.-C., dernier beau-père de Jules César et protecteur de Philodème.
En mars prochain, une sélection de papyrus sera amenée à Oxford pour des numérisations haute résolution à l’aide d’un accélérateur de particules, une technique innovante qui permettra d’obtenir des images détaillées sans endommager les textes. Les données seront ensuite traitées aux États-Unis où un autre mécène, autrement plus riche que Pison, trouvera, si d'aventure il les lit, matière à réflexion. Sur l'utilité dans l'amitié. Sur l'usage qu'on peut faire de son argent. Où il pourra aborder les questions qu'on se posait dans cette somptueuse villa, sur le Belvédère en regardant les bateaux qui continuaient vers la Corse, la Sardaigne, en songeant au naufrage, demander à Philodème de Gadara si la richesse va vraiment avec la vertu. Ou si c'est, comme le bateau d'Ulysse, un rêve qui passe. Qui est passé.